La cuisine française, questionnée par les tendances plus “exotiques” et par le succès de l’artisanat de bouche

La pizza, le burger, les ceviches, les ramens, les gyozas, les falafels… Les tendances de la restauration ont pris ces dernières années un reflet exotique, dynamisant l’offre à Paris mais aussi partout en France. Inscrites dans des codes de consommation plus actuels, elles ont apporté modernité et renouveau et ont progressivement pris le pas sur la cuisine traditionnelle française, un peu dépassée.

Pourtant, difficile de dire que les saveurs françaises n’ont pas su se mettre au goût du jour. Derrière une volonté de réel retour au bon produit et au vrai savoir-faire, l’artisanat de bouche et les producteurs locaux ont aussi su se renouveler et répondre aux attentes nouvelles d’un consommateur plus attentif et mieux « éduqué » aux saveurs. Circuits courts, filières de qualité, production urbaine, marchés de terroir, savoirs d’autrefois : l’avènement (ou plutôt le ré-avènement) du produit « bon et bien fait » a redistribué certaines cartes sur le marché français.

Le bistrot français, loin des codes de consommation actuels ?

Coincée entre ces deux tendances, la restauration « de cuisine française » a ainsi un temps semblé un peu déboussolée, peinant à adapter le bon produit français, la bonne recette française, aux codes de consommation actuels, imprégnés de la street food et du fast slow food. Le bistrot français se serait ainsi laissé tombé en désuétude, son identité devenant presque ringarde.

Le renouveau du bistrot : une restauration française “enfin cool”

Crédit photo : Le Monde

Ce retard semble aujourd’hui comblé. Après plusieurs années de renouveau progressif, la revanche du bistrot et de la cuisine française est proche d’être prise, avec le retour en trombe de saveurs que nous connaissons bien, enfin adaptées au rythme des consommateurs de l’époque. Une restauration française enfin cool, célébrée par le Guide Fooding 2016 et sa cuisine faubourgeoise, bistrotière, diverse, accessible, de qualité, du jour, qui a su se nourrir des inspirations étrangères, de la street food et s’ancrer dans son temps.

La néo bistronomie, quels partis pris ?

Plusieurs partis pris animent ces « néo-bistrots », des choix forts qui ont séduit le consommateur mais aussi inspiré les enseignes street food voire la haute gastronomie :

  – la francisation de classiques étrangers, présentés et déclinés « à la française » (que l’on retrouve aujourd’hui dans le burger de Big Fernand ou le Kebab de Grillé)  ;

  – l’utilisation de légumes, épices, ingrédients anciens ou perdus ;

  – le désir de fraicheur avec des cartes réduites, préparées selon les arrivages des marchés, selon les saisons, marquant la reprise de pouvoir du restaurateur, comme chez Dersou ou à l’Acolyte ;

  – un sourcing très français, célébrant l’artisanat, le savoir-faire local, comme chez Pedzouille ;

  – le retour à des plats régressifs, nostalgiques, simples, ancrés dans la culture, bien exécutés, comme chez les Fils à Maman (qui se sont développés un peu partout en France) ou encore La Classe ;

  – la célébration des classiques de la gastronomie française, revisités, comme le Tartare du B.A.T., le velouté de l’Atelier Rodier, l’œuf mollet & poireau vinaigrette du Bon Saint Pourcain (élu meilleur bistrot du Guide Fooding 2016).

Crédit photo : Gustave et Rosalie

Le bistrot français : authentique et… moderne

La recette de la modernité semble ainsi parfois bien simple : revenir au cœur du sujet, aux héritages qui ont fait leur preuve, aux producteurs que l’on a déjà à côté de soi et affirmer des partis pris forts, qui font de la (néo)bistronomie une vraie manière de voir la restauration. Et ils sont de plus en plus nombreux, ces « modernes », à revenir aujourd’hui à ces cartes réduites et audacieuses, à ne pas avoir peur d’être authentiques et traditionnels, et à redorer le blason des saveurs françaises.

Crédit photo : Do It In Paris

Crédit photo, Image à la une : La Belle Assiette